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Arlt - La langue
On s’imagine bien déjà le tableau : des chansons qui parlent du quotidien, tout en retenue, des petits détails prosaïques ou des petites révoltes qui ne coûtent pas cher, suivant la sensibilité. Mais ce n’est pas le cas. Car si la musique d’ARLT n’est pas vraiment révolutionnaire (et personne n’exige cela d’un jeune groupe français qui sort un album sur un micro-label), elle offre les promesses d’un univers propre, à la fois familier et décalé du notre. Commençons par les évidences pour situer le groupe. ARLT est un duo homme - femme. Il y a Sing -Sing : barbu, des pattes proéminentes, la fiole de whisky à portée de main, une veste à carreaux, une guitare et une voix qui murmure. Et il y a Eloïse Decazes : du rouge à lèvres, un manteau à carreaux, une robe à carreaux avec la poche pour ranger la fiole de whisky, une voix légère et un peu lyrique, éduquée en tout cas pour savoir vraiment chanter. Et c’est tout. Le moins qu’on puisse dire alors est que la musique d’ARLT est minimaliste (ou plutôt épurée, comme le signale le groupe dans l’entretien que vous pouvez lire ici ). Non seulement les moyens sont limités, mais le groupe n’essaye pas de les dépasser, comme le feraient les white stripes, cette armée de deux. Sing-Sing ses trois accords, de temps en temps un petit solo, bon, en réalité c’est plus compliqué que cela, mais ce n’est pas l’essentiel. Il y a la volonté de créer une ambiance intime, faire se concentrer sur un changement d’accord, sur un arpège. Par exemple dans « je voudrais être mariée », le refrain est monolithique, et puis il y a un petit changement, qui allège le tout, et c’est beau. Le disque est court et compact, pleinement conscient de ses limites. Dans un tel contexte, on comprend aisément quel peut être l’enjeu majeur d’un tel disque, ce qui en fera un bon ou un mauvais disque. Les textes : valent-ils le coup qu’on leur prête l’attention qui nous est demandée ? Réponse en deux temps : d’abord, eux aussi sont minimalistes : 5 - 6 phrases par chanson, des miniatures qu’on peut saisir tout entier dans l’œil. Mais surtout, bien écrits, et originaux. Chez ARLT, comme pour tout le monde, l’amour est la grande affaire. Mais c’est un amour bizarre, fragile au minimum, fataliste le plus souvent : « nous sommes un éboulis de pierres : tombons » disent-ils dès la première chanson. Donc il y a l’amour toujours fragile, il y a la mort omniprésente (« d’un coup tous les oiseaux, sont tombés au sol, d’un coup d’un seul »), et il y a le corps au milieu (« le coeur sachez c’est un métal saignant » ou « son corps contre mon corps c’était comme revoir la mer »). C’est incisif, poétique, et adéquat. Autant dire que la « La langue » d’ARLT est une bonne surprise. Ce premier album est produit par Mocke, le guitariste de l’excellent groupe Holden, qui apporte ça et là quelques solos dans son style très caractéristique. Et donc forcément, il y a un peu de Holden dans ce disque, mais ce n’est pas le genre de choses dont on peut se plaindre. Il y a un peu de Mansfield Tya, dans la fragilité et le dépouillement. Il y a même un final qui rappelle un peu Jim O’Rourke, comme ça, tranquillement. Le groupe est régulièrement en concert près de chez vous (sauf si vous nous lisez d’Haïti ou d’outre-mer). N’hésitez pas à consulter leur myspace pour les dates. Pour en savoir plus : Bien sûr lire les réponses à nos questions par le groupe au grand complet . Une émission de radio enregistrée à New York. Le concert à emporter du groupe Les vidéos et la pochette de l’album sont tirées de la page myspace et de la page youtube du groupe.
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Mes oreilles sont cassées
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