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Foals - Total life forever

Par Benjamin S., Jeuniste du prix et de la mornographie , le mercredi 26 mai 2010.

Total life forever, ou peut-être le disque que j’attendais le plus cette année. Rien que ça. Il s’agit du deuxième album de Foals, groupe dont le premier effort Antidotes m’avait frappé par surprise. Surprise parce que pas connu bien sûr, mais surtout surprise de voir à quel point ce disque, au premier abord pas si différent de ce qui se fait ailleurs (batterie disco, guitare un peu post-rock, pourquoi pas), n’avait jamais quitté ma liste d’écoute.

Surprise aussi, lorsque je les ai vus en concert de voir à quel point le groupe semblait plus à l’aise dans la construction d’ambiance, que dans le bal dansant.

Résultat, quand le clip de spanish sahara a débarqué, en avant goût, j’avoue que j’ai quand même encore été un peu surpris.

Clip de Spanish sahara

En général, le premier single sert d’amuse bouche : pas le meilleur morceau de l’album, mais celui qui attirera l’attention par son côté léger. Là, nous voilà face à un bloc de presque sept minutes, très lent même dans son déclenchement final, jouant tout sur l’ambiance.

Au même moment, un premier article des inrockuptibles nous prévient : le nouvel album sera très différent, plus complexe, plus beau, un vrai chef d’oeuvre même. De mon côté, je me dis : d’accord, on change, bien, j’aimais beaucoup Antidotes, mais enfin, s’il le faut. Pas complètement rassuré et en même temps totalement impatient.

Et puis, un beau jour de mai, je tombe sur une première critique par hasard sur le net, regarde la date de sortie, et constate heureux, que c’était ce jour même, quelle bonne nouvelle. Sur le chemin du retour, je regarde la pochette.

Plus fort que les quatre garçons dans le vent, les cinq poulains (foals en anglais) dans l’eau - 46.8 ko
Plus fort que les quatre garçons dans le vent, les cinq poulains (foals en anglais) dans l’eau

Je pense bien sûr à celle de Nevermind de Nirvana, l’ironie en moins. Juste des gens qui flottent, la lumière dans le ciel qui les éclaire. Beaucoup de sérénité.

Première écoute enfin, et surprise, pas très bonne d’ailleurs : les discobeats ont (à très peu de chose près) complètement disparus. Même la tension des morceaux lents du premier album n’est plus là non plus.

Les signes, alors, comme dans un roman de Dan Brown, commencent à faire sens. Mais alors, le premier clip annonçait bien la couleur, et la critique dithyrambique des inrockuptibles, bien sûr j’aurais dû y penser, ils n’aiment que ce qui est tiède et mou, les concerts où le groupe foirait les morceaux rapides, c’était pourtant clair, ils sont passés à autre chose. Quelle cruelle désillusion.

This orient, l’un des morceaux les plus « agressifs » de l’album et second single

Malgré tout, ce disque on l’a acheté, alors il faut bien lui donner une seconde chance. Puis une troisième, une dixième, enfin, bref, ce disque je le déteste, et pourtant je l’écoute tout le temps. Alors, je ne peux pas vous donner mon avis sur ce disque, vraiment je ne saurais pas vous dire si c’est un chef d’oeuvre ou une escroquerie, mais au moins, je peux vous dire ce que c’est. Le premier album fonctionnait tout entier sur l’idée de tension, et l’annonçait dès le premier morceau : le rythme y montait tout du long, jusqu’à une explosion dont jaillissait Cassius, LE monstrueux single.

Ici, le premier morceau refuse cette montée en tension. S’il y a bien une construction assez typique du post-rock (pensez à Mogwai) basée sur une lente progression qui finit par exploser, le rythme redescend presqu’immédiatement pour revenir au couplet lent du début. Le morceau qui suit, futur single je pense, sonne comme ce que Cure a pu faire récemment (pensez the end of the world) : un morceau bien fait, avec un refrain gentil.

Les cuivres afrobeat amenées par David Sitek (membre de TV on the radio) sur le premier album, sont repartis avec lui, pour laisser toute la place au jeu de guitare très math-rock bien sûr, mais teinté d’harmonies maliennes, du leader Yannis Philippakis. En clair, oubliez les accords ou riffs, Foals ne joue pratiquement qu’en doux et moelleux arpèges.

Total life forever est un album parfaitement reflété par sa pochette, spirituel, aquatique, et apaisé. Le premier album avait une production à vif, ce nouvel album joue au contraire sur un mixage très profond, où les instruments au premier et à l’arrière plan permutent constamment. La voix du chanteur semble venir de très loin, elle est même le plus souvent doublée, voire quadruplée. Les morceaux sont plutôt longs, avec quatre morceaux sur onze à plus de cinq minutes et surtout l’impression que le groupe prend son temps, se laisse porter par le fleuve.

En bref, une fois que l’on a bien compris que Foals n’est pas là pour casser la baraque, mais pour flotter sur la barque, on prend plaisir à l’album, on apprécie l’explosion d’After glow pour ce qu’elle a de rare, on savoure la douceur d’un 2trees qui semble directement sortir du In rainbows de Radiohead (qui comme Foals vient d’Oxford).

Ma conclusion est donc que comme la marée, ce total life forever prend son temps pour monter en nous, mais finit inexorablement par nous noyer dans sa charmante torpeur. Ce n’est pas ce qu’on était venu cherché, mais comme Colomb trouvant l’Amérique au lieu des Indes, on y perd pas tant que ça au change.

Pour en savoir plus :

Le site officiel de Foals.

A noter que la version deluxe de l’album contient un second disque contenant des passages des morceaux en version demo. Pas le genre de chose qu’on écoute régulièrement, mais qui montre quand même l’évolution du groupe en studio. Quand on entend ses premières versions, ou quand on voit la version live d’Alablaster qui traîne sur youtube, à peu près trois fois plus rapide que celle de l’album, on se rend compte à quel point les morceaux ont petit à petit évolué vers plus de lenteur, de mélancolie.


Mes oreilles sont cassées