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La France Romane

Par Le Ministre du Ministère , le lundi 23 mai 2005.

Attention, titre d’expo tout à fait trompeur. De France, on ne voit que l’aspect religieux. Si l’expo avait eu pour nom "l’art de la France romane", ou mieux encore "France Romane : l’art et les églises", cela aurait nettement plus collé à ce qui était présenté - par ailleurs excellent. De fait, ici, surtoutdu religieux, du monastique en particulier : chapiteaux sculptés, enluminures, ivoires, etc. C’est splendide et assez intelligemment fait, mais rien sur la culture matérielle laïque. A cela, pour l’instant, pas de réponse : pas de fouilles dans ces endroits (par parti-pris pro-église ?), rien à trouver (peuple trop pauvre), etc.

Or si l’Eglise du haut moyen-âge est certes le bastion culturel (la culture laïque ne se développant de façon autonome que vers le XIe-XIIIe siècle), il est abusif de prétendre - et de démontrer dans l’expo - que les laïcs n’ont et ne font rien.

Par ailleurs, un choix historiographique assez important est fait dans les panneaux explicatifs. L’un d’entre eux insiste sur la "mutation de l’an mil", concept historique important mais tout à fait critiqué. En gros, vers la fin du Xe siècle, avec la fin des invasions barbares majeures (en l’occurence les Normands se calment), le développement conséquent du commerce, une mutation climatique qui favorise l’agriculture et le développement démographique, l’Europe occidentale connaît un essor culturel et matériel majeur. La citation-bateau empruntée à Raoul le Glabre, qui dit que l’Europe s’était couverte d’un "blanc manteau d’églises", est appelée en renfort. Le parti-pris de l’expo, qui prend pour acquise cette théorie, sans donner un minimum de recul critique au visiteur, est contestable. Beaucoup d’historiens tout à fait sérieux affirment que s’il est vrai que la fin du Xe siècle voit effectivement une période de prospérité européenne commencer, elle n’est ni aussi soudaine ni aussi spectaculaire qu’on l’a affirmé ; elle n’est pas non plus coupée des siècles précédents, auxquels elle doit beaucoup (l’exemple des styles romans, par exemple, est flagrant :il y a continuité et non rupture, puisque le gothique ne fait son apparition timide qu’à la fin du XIe).

Dernière critique, formelle celle-ci : l’irritante manie du "éclairons le moins possible". On ne sait pas si c’est pour recréer l’atmosphère d’un cloître roman, ou par économie d’ampoules, ou encore pour ne pas abimer les oeuvres, mais toujours est-il qu’il est fréquemment impossible de bien regarder les oeuvres les plus menues (enluminures, pièces taillées fines).

Et puis aussi il y a des familles catho-lapin partout, et des vieux. Mais bon, on s’y attendait un peu. Au-delà de ça, un panorama exceptionnel, puisqu’il mêle une lecture géographique (centres de production), analytique (types d’oeuvres), voire stylistique (les chapiteaux, les enluminures), et ne se contente pas d’asséner un catalogue d’oeuvres à renfort de commentaires trop fouillés ou trop limités, mais essaye vraiment d’instruire le visiteur. Enfin et surtout, les oeuvres sont magnifiques.

A voir donc, même si c’est un peu cher (8,5 euros !). A quand les musées gratos comme à Londres ?

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Est-il beau, l’expo ?