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Frères de sang - Taegukgi
Film avec plein de sang, de scènes de bataille, de combats mano à mano, de grosses gerbes de sang - et quelques chars. Malgré ces atouts évidents, est-ce nécessairement un bon film ? Est-ce même un film nécessaire ?
La question se pose. Effectivement, la première scène du film laisse sceptique. Ca commence exactement comme Il faut sauver le soldat Ryan, c’est-à-dire qu’on retrouve, cinquante ans après la guerre de Corée, un survivant. La scène d’introduction présente un vieil homme, à la recherche de son frère, mort pendant le conflit. Elle en dit juste assez pour qu’on sache que ledit frère est mort ; elle laisse ce qu’il faut en suspens pour qu’on se demande comment, et qu’en plus, on se demande bien comment. Jusqu’ici donc, pas de quoi fouetter un chat, ou alors juste gratuitement, pour le plaisir. La suite de l’introduction se poursuit avec le flash-back qu’on attend dans le passé. On retrouve les deux frères, quelques jours avant le début de la guerre. L’atmosphère est niaisarde à souhait : on s’aime, on s’adore, on se fait des bisous, on va finir par faire vomir le spectateur lambda, d’autant qu’on rajoute des ralentis là-dessus. On commence à abuser. Survient l’événement déclencher : ces saloperies de communistes du Nord viennent foutre leur merdier dans le joli paradis du Sud, et les deux frérots se font embarquer à la guerre. Maman pleure, mais elle est muette, alors ça fait « rheu, rheu », comme une 2CV qui démarre. Bobonne est très jolie et pleure aussi, tout en ramassant maman qui est tombée. Très triste.
Là, on se demande si on a bien fait de venir. Ca commence à sentir le roussi pour le réalisateur. Sauf que maintenant, les choses sérieuses vont commencer. La suite de l’histoire suit les deux frères dans le conflit, jusqu’à la fin de 1950. On les voit poussés à la dernière limite par des soldats du Nord victorieux ; puis la vapeur est renversée, on enfonce les lignes des vilains cocos ; on arrive près de la Chine, fallait pas, y’en a plein qui débarquent en criant des idéogrammes (ce qui est très dur), et on se retrouve donc sur le 38ème parallèle. Entre-temps, les frères, d’abord enrôlés de force, sont devenus de braves soldats. Grand frère est même un sacré cador ; petit frère, par contre, n’est pas d’accord, mais ça ne l’empêche pas de tuer des gens avec du sang dedans, mais pour sauver sa peau, alors ça compte pas.
Le film, malgré ce résumé où j’ai fait preuve à la fois d’une maîtrise exceptionnelle puisque j’ai vraiment pas tout raconté, et d’un sens aiguisé de la formule ; ce film, donc, se plie effectivement aux conventions du genre - la guerre sous toutes les coutures.
La vérité ici comme partout est ailleurs. D’ailleurs, partout c’est en général ailleurs. Ce qui est vraiment bien, c’est le regard général sur le conflit, plus largement, sur les destins séparés des deux parties du pays. L’auteur ne s’acharne pas lourdement à faire un gros parallèle entre la grande histoire et la petite - celle des deux frères.
Pour en finir avec une déjà trop longue critique : faut-il aller le voir (pour reprendre une catégorie fondamentale de la critique cinématographique, introduite par B. Sauzin dans Moi et John B. Root, entretiens exclusifs) ? Ben ça dépend. En gros, il faut aimer le gros gore qui tache, les grosses émotions colossales à la louche. Mais on peut aussi aller le voir si on veut voir comment les Coréens traitent, par le cinéma, de leur passé récent. A mon avis, c’est d’une façon, paradoxalement, bien plus saine que nous ne le faisons en France. |
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