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APOCALYPTO(mie), de Mel Gibson(le glas).
Où l’on apprend que l’ami d’Australie n’est ni Fernand Bretelle, ni Jean-Renée Russo.
Par Le Ministre du Ministère , le samedi 20 janvier 2007.

Alors mercredi soir, voulant m’épater les mirettes à peu de frais intellectuels devant une grosse reconstitution à trois balles, je me dis : file voir ce film et mets ton cerveau en veilleuse. Il a pas tardé à se réveiller, et comme il ne fait que des jeux de mots à trois balles, il est nécessaire que je m’en débarrasse, sous peine de continuer à faire terminer toutes mes phrases en « ec », alors que c’est chez les Mayas, pas les Aztecs, ce n’serait donc pas correc. Voilà que ça me reprend.

On est donc chez le gentil peuple des Tablentek, qui vivent en harmonie avec la nature, chassent le cochon, et se font des blagues (frotte-toi les couilles au piment, tu feras des fils, mon homme, ou l’inverse). Parmi eux, notre héros, qui se distingue par cette aura particulière aux grands fauves de l’écran (Georges Beller, Roger Moore ou encore Pierre Mondy), l’homme aux mille surnoms, mais pour l’instant je me contenterai de l’appeler Mangetonsteak. Il est marié avec la jolie Maya, un peu niaise (il m’a pas pris longtemps à trouver celui-là). La vie est parfaite. Rousseau passe dans le fond en faisant coucou.

Surviennent la méchante escouade des Carrémentabjec, qui ne vivent que de rapines, de sacrifices sanguinolents, et accessoirement de piercings multiples. Cette joyeuse bande de punks en slip panthère vient donc faire le plein de chair fraîche, ratisse le village et, vous l’aurez compris choppe tout le monde (malgré une résistance héroïque, et bla, et bla), et les embarque pour la grande ville, heili, heilo. Drame, notre ami Pafins’mec a planqué Maya (enceinte jusqu’aux yeux) et leur petit dernier, Lamaisonnprempadchec, au fin fon d’un trou, ben oui, c’est tellement plus malin.

Passons sur les péripéties diverses : évidemment, on assiste à un splendide sacrifice avec vue sur foule en transe, perpétré par l’horrible Architek, assisté de son fidèle Salamalec. Notre ami est sauvé in extremis par... une éclipse. Nous l’appellerons désormais Tintec. S’ensuit un vague jeu où on leur dit court par là c’est la forêt et boum, un flèche dans ta gueule, mais bien sûr si vous me suivez vous devinerez aisément qu’il s’en tire et file dans la forêt, non sans avoir au passage pris quelques projectiles diversement acérés dans le bide, et occis le fiston du chef des méchants, le dénommé Prisedebec, qui a tendance à régler ses différends à coups de canif dans le gras de la panse. Un sympathique bonhomme donc, qui bien sûr se met en chasse.

La course-poursuite qui constitue la dernière demi-heure du film voit notre ami Emilzatopek courir pendant trois jours, avec un trou au côté de votre choix, et une horde de Mayas tatoués à ses trousses. Ces gentils skateurs gothiques se font esquinter définitivement de diverses manières par l’homme de nos pensées : tatane dans la gueule (tatane en caillou ceci dit), méchant jaguar de la forêt (une scène sur laquelle je reviendrai), méchant serpent de la forêt, méchante petite piquouse à la grenouille de la forêt (ci-gît Jdigèrepamongrec, mort par grenouille), ou encore vilaine chute du haut d’une cascade de la forêt. A la fin, l’ami Hôpitallaënec (parce qu’il a quand même une sacrée maîtrise de la pharmacopée : trois bouts d’écorce et son trou dans la rate n’est plus qu’un vilain bobo) expédie ad patres les quelques crétins qui n’avaient pas encore compris le monceau de présages bien lourds qui jonchaient leur chemin depuis le début du film, des signes pourtant gros de chez obèse : éclipse, musique nulle à l’approche d’un danger imminent (ces forêts sont quand même super bien sonorisées), et petite fille aux yeux fous qui leur dit je ne sais quoi au sujet de la fin des temps est proche et surtout la tienne toi le tatoué là. Maya mousse aux crocs au fond de son puits, s’auto-accouche dans la flotte, mais est sauvée par son boyfriend béat.

La fin déboule sur l’écran avec pêle-mêle les Espagnols qui débarquent (pourquoi pas...) et notre petite famille qui plie bagages et file emménager dans un pavillon Phénix en banlieue de Mexico. Fin de l’histoire.

Quel est le propos de notre ami historio-linguiste judéophage à ses heures, le dénommé Mel(toidtoncultudirasmoinsdconneries, probablement ma plus navrante) ? Une citation légère comme un flan au ciment nous le dit au début : « les civilisations, quand c’est qu’ça se casse la gueule, c’est qu’cest pourri en d’dans », avec nom d’un historien quelconque à l’appui. Donc, les vilains Mayas (et tous les autres) auraient commencé à casser leur pipe bien avant que ne débarquent les Ibériques, la croix au chapeau, le pétard en bandoulière, suivis de quelques millénaires de saloperies microbiennes bien de chez nous, et de quelques fâcheuses habitudes (esclavage, déportation, cupidité maladive, j’en passe). Pourquoi pas ? Mais la démonstration est d’une simplification navrante, alliant la grande mystique de bazar à quelques « faits vrais ». Le détail tient lieu ici de caution intellectuelle (attention, moi môssieur mes indigènes causent un vrai patois d’là-bas). Sur le fond, c’est grande crétinerie.

Là où ça se corse, c’est quand Mel se targue par ailleurs de nous balancer sa grande pensée puissante sur le pourquoi du déclin et le comment faire mieux, en comparant les petits sympas aux les gros méchants pas sympas, tout cela avec la finesse d’un Bigard évoquant les tampax de sa femme. En gros, dans le coin vert, la nature, les blagues entre potes qui chassent (la virilité gibsonienne c’est un peu l’esprit de vestiaire après le foot, mais avec des arbres autour), les chouettes veillées au coin du feu où on écoute sagement papi débiter des paraboles d’un air pénétré, après quoi, zou, c’est boîte de nuit autour de la flambée. Dans le coin rouge, c’est urbanité méchante, c’est superstition cruelle, c’est l’oppression mon ami. Je souhaite vivement qu’un jour Mel Gibson se fasse écharper par un gentil sauvageon de la forêt, à coups de grenouille si possible.

Mais le pire, c’est que Mel(asseinsipide) nous fout tout ça dans un film même pas divertissant trois secondes. A la rigueur, faire une merde toute pourrie mais qui fait rire, d’accord : mais Chuck Norris est passé et à gardé le secret. On s’attend à des gros plans sur une cité Maya, un truc qui flashe un peu façon Rome dans Gladiator, on a droit à quelques plans serrés sur une place de village en carton, dont les acteurs font huit fois le tour pour nous faire croire qu’en réalité, c’est énorme (tiens, encore le même figurant ?). Amateur de reconstitutions, passe ton chemin. Il sombre encore plus loin dans la mocheté cinématographique en nous gratifiant de quelques détails qui ne feraient pas tâche dans un nanar des plus gras : un mannequin en mousse pour un type qui tombe, des plaies au ketchup, et surtout une attaque de jaguar (je vous avais dit qu’on y reviendrait) qui m’a quand même un peu sauvé le film, tellement elle est hideuse. En gros, on jette une peluche noire sur un acteur, qui pousse de grands cris, on rajoute quelques bruitages de fauve énervé (wraw), on fait beaucoup bouger la caméra dans tous les sens, et abracadabra : ATTAQUE DU FELIN ! Avec un budget de dix euros, la vie d’ma mère, je fais mieux.

Résultat des courses : Apocalypto est une merde même pas drôle, même pas belle, même pas avec des vrais combats où on rigole (c’est un peu le porno de l’éjaculation précoce de la baston : hop, esquive, poum, t’es mort et tu saignes beaucoup par un gros trou filmé de près), même pas avec des dialogues rigolos où on dit n’importe quoi, et même pas une scène de cul (alors que tout le monde est à poil en permanence). N’est pas Terrence Malick qui veut.

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