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Ne touchez pas la hache (d’un flic qui dort)

Par Benjamin S., Jeuniste du prix et de la mornographie , le samedi 14 avril 2007.

Rivette est un homme sévère. Le matin, quand il se lève, il pense à des choses très sérieuses auxquelles nous, pauvres fous, ne sommes pas capables de penser. Par exemple quand il adapte Balzac, voilà à peu près ce qu’il se dit : "Bon, je vais pas faire mon France 2 à foutre des violons et Charles Aznavour. Je vais aller directement au coeur du truc : prendre deux acteurs, bouger la caméra le moins possible, la musique, y en aura qu’en son direct. La voix-off, c’est un truc d’américain, ça. Non, je vais mettre des intertitres, on sentira mieux la rupture de ton, et de temps. Pour les acteurs, je va prendre Depardieu fils : un mec qui fait peur avec sa jambe de bois, et Jeanne Balibar comme ça on trie ceux qui viendront... Et surtout pas de Lucchini, bordel, on est pas au cirque."

Un homme sec, une coiffure funky - 6.8 ko
Un homme sec, une coiffure funky

Sérieusement : de quoi ça parle ? La duchesse de Langeais est une femme de salon, qui doit tenir le rang acquis depuis peu par sa famille dans la société Parisienne. Elle rencontre le marquis de Montriveau, ancien héros Napoléonien, ancien explorateur, homme bourru mais séduisant (mais bourru, quand même). Elle l’allume, puis se refuse à lui. Le problème c’est que Montriveau fait partie des 13, une société secrète super puissante. Et en plus, il est bad ass au possible. Autant dire qu’il va pas se laisser marcher sur les pieds comme ça.

On imagine le traitement par un réalisateur pas bien finot, avec Depardieu qui hurle au ciel sur fond de musique baroque (toujours élégant). Mais, là, non, c’est juste sec. On pense même parfois au Gertrud de Dreyer tellement c’est sec. Sur le même thème, on voit toute la distance avec le Gabrielle de Chéreau, qui voulait absolument faire cinéma. Là, c’est clair, Rivette se fout d’épater le spectateur. Il y a trois décors, deux acteurs et demi, et beaucoup de texte, et ça suffit. Même à la fin, avec les ninjas de l’empire, ça ressemble pas du tout à 300 (c’est dommage, on aurait bien imaginé Depardieu empaler des nonnes dans un couvent en feu avant de violer Balibar. Peut-être pour le remake).

L’homme qui fait peur aux petits enfants - 18.1 ko
L’homme qui fait peur aux petits enfants

Mais du coup c’est bien. Car derrière tout cela, il y a la vérité fondamentale de l’amour (enfin si on est d’accord avec ce qu’en dit Lacan, c’est comme vous voulez) : l’amour, c’est le manque. C’est toujours quand l’autre se refuse qu’il devient désirable. Alors pas besoin de multiplier les personnages. Pas besoin d’en faire trop. Il y a un homme, une femme, et le désir au milieu, et évidemment, ça finit pas très bien, parce que les histoires d’A finissent mal en général.

Jeanne Balibar actrice sérieuse - 5.7 ko
Jeanne Balibar actrice sérieuse

Bref, en résumé : très bons acteurs, qui jouent en retenue, bien que de façon un peu théâtrale (la voix suraigüe de Balibar, les récits de voyage de Depardieu, dits en regardant le sol avec une vraie douleur intérieure), un dispositif qui va au coeur du roman de Balzac, et un film qui peut bouleverser comme il peut ennuyer (mais de façon polie), tant il est sec.

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