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Chronique par Benjamin S. Hellboy
1944, Hitler voit la guerre lui échapper. Dans un ultime sursaut d’orgueil, il mandate Raspoutine, décidément pas mort, pour ouvrir une porte vers les enfers. Un assaut des alliés fait échouer en partie l’opération, puisqu’une seule créature a passé la porte, un petit démon, que les américains adoptent. 60 ans plus tard, le petit est devenu grand, et est enquêteur très spécial pour le FBI. Quels sont les thèmes ?Hellboy, c’est une des meilleures BD américaines de la dernière décennie. Son adaptation ressemblait à une gageure : l’original fonctionne grâce à un dessin très carré, avec un éclairage expressionniste qui minimise le nombre de couleurs : Hellboy est tout rouge, Abe Sapiens l’homme poisson tout vert, le décor très sombre. Autre défi : les monstres : régulièrement énormes, et particulièrement hideux.
Qu’allait-il en rester ?
Ici, la technique est parfaitement adaptée, puisque le personnage fait naturellement irréel. Les monstres sont eux-même particulièrement réussis, énormes et laids, même si la palme revient au terrifiant guerrier robotisé SS, qui rappelle que Del Toro aime les mécanismes manuels (cf. la boîte magique dans Chronos, et je crois qu’il y a une boîte à musique dans Mimic). Le film s’inscrit d’ailleurs très bien dans la filmographie de Del Toro : les couloirs du metro ont une grande importance comme dans Mimic, la direction artistique prolonge directement Blade 2. L’ambiance est très bien rendue au niveau des couleurs, avec des teintes dominantes suivant les lieux, avec notamment une scène énorme en montagne pour le retour sur terre de Raspoutine, et des décors pleins de colonnes, de ruines, et où même le plus high-tech fait rétro. Par contre au niveau éclairage, on reste loin de la BD, ça reste très normal. A ce niveau là, peut-être Del Toro aurait pu s’inspirer un peu du travail récent de Guy Maddin, fou furieux canadien qui fait aujourd’hui des films des années 30. Il n’empêche : sur le plan technique, le film est une grande réussite : il est beau et crédible. Le dernier défi à relever pour un grand film, c’est donc le rythme. C’est là que le bas blesse un peu. Comme Spiderman 2, l’histoire mélange l’intime et le colossal, mais ici l’équilibre est moins bon que chez Sam Raimi. On sent les deux univers trop séparés alors que l’un devrait être le moteur de l’autre. Le problème est que c’est psychologiquement un peu trop sommaire : le trauma déclencheur du personnage féminin est un peu cliché, la scène de jalousie de Hellboy est un peu trop classique, et perd beaucoup en intensité avec l’arrivée de l’enfant. Et surtout, on est pas tellement intéressé par cette histoire, peut-être parce qu’un démon rouge et une femme bombe incendiaire sont trop loin de nous. Tout le contraire de Peter Parker, l’homme normal avec des problèmes de la vraie vie. Du coup le dilemme final de Hellboy entre sombre extinction et néant tombe un peu à plat, ne serait-ce que parce qu’on imagine mal la fin du monde au bout du premier épisode. Par contre, quand le film joue la carte du poétique, il touche juste : notamment dans la relation entre Raspoutine et l’officière SS, et dans les scènes de pyrotechnie avec Selma Blair. En somme, quand le film retrouve l’esprit de Chronos, il fait mouche. Pour être parfait, Hellboy aurait du mélanger l’efficacité de Blade 2 et l’onirisme de Chronos : le mélange ne prend que par endroits, et on a trop souvent des bouts de l’un puis de l’autre et au milieu une pâte à grumeaux. Et alors c’est bien ?Ne soyons pas négatifs, le film affiche de solides qualités : des personnages charismatiques, une esthétique personnelle et intéressante, des scènes d’action très réussies. Mais il y a certains défauts énervants : une intrigue un peu simplifiée pour plaire aux adolescents, et surtout une histoire d’amour qui passe un peu à côté et casse le rythme. Reste un bon film de super-héros, avec suffisamment de personnalité pour se démarquer de la masse, et qui pose de très bonne façon les personnages, en espérant un deuxième épisode plus jusqu’au boutiste.
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